L’enseignante, le journaliste et les réseaux sociaux

Posted on 19/09/2011

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Présentations

Laurence Juin : enseignante de français, histoire-géo et éducation civique en lycée professionnel à La Rochelle, a introduit l’usage des réseaux sociaux dans sa pédagogie depuis septembre 2009.

Jean-Christophe Dupuis-Rémond : enseignant en webjournalisme à l’Université de Metz et journaliste spécialisé, pilote depuis septembre 2010 la cellule web de France 3 Lorraine où il défriche interactions et nouvelles écritures journalistiques.

Présents et très actifs sur les réseaux sociaux, en particulier Twitter, nous suivons nos avancées et réflexions réciproques dans l’usage des réseaux sociaux: Jean-Christophe en journalisme, Laurence dans l’éducation. A la lecture de nos tweets, de nos blogs, de nos expériences et interactions partagées (Jean-Christophe est intervenu dans la classe de Laurence pour la rédaction d’une Charte Facebook), nous constatons régulièrement que nous sommes confrontés aux mêmes problématiques d’usages.

Dans ce billet, nous comparons chacun nos pratiques des réseaux sociaux, les leviers qu’ils déclenchent, les freins qu’ils supposent avant de mettre en perspective les améliorations à apporter pour les amplifier quantitativement et qualitativement.

Il s’agit ici de proposer un état des lieux pour dresser un constat comparatif global : les problématiques d’usage des réseaux sociaux sont-elles les mêmes en éducation comme en journalisme ?

Le wordle généré par cet article à 4 mains

1) L’usage des réseaux sociaux: quels besoins identifiés?

                                      a) Dans l’enseignement   

Le constat est fort : La CNIL par son rapport paru en ce mois de septembre 2011 pointe sur l’explosion de l’usage des réseaux sociaux chez les adolescents et pré-adolescents : le web 2.0 est devenu une des ou la pratique principale de l’internet chez les jeunes.

Ce rapport pointe aussi sur l’ignorance des adolescents comme de leurs parents vers un usage raisonné de ces réseaux : on constate la défaillance de l’éducation familiale/parentale par ignorance: les adultes ont découvert en même temps que leurs enfants ces usages de l’Internet. C’est un fait nouveau dans nos sociétés modernes : Internet est une pratique intergénérationnelle que nous découvrons tous en même temps avec peu de recul. Les adultes (la famille comme l’école) découvrent en même temps que les enfants sans que personne n’y soit éduqué ou formé (dans la sphère familiale, éducative et professionnelle). La seule formation que l’adolescent reçoit pour le moment (hormis quelques cas exceptionnels dans un cursus scolaire ou par des parents “geeks-éducateurs”) vient du grand frère ou copain qui transmet le fonctionnement mais pas l’éducation citoyenne de l’outil.

Les problèmes rencontrés sont donc récurrents: diffusion de propos, de photos qui peuvent porter préjudice à l’ “Autre”.  Aucune valeur ou conscience ne sont réellement données à l’écrit ou à la photo publiés.

Ajoutons un effet médiatique désastreux de l’image des réseaux sociaux (focus sur les apéros Facebook au printemps 2010) qui appuie l’idée que le réseau social n’a pas sa place à l’Ecole et encore moins dans la pédagogie. Seule la face négative des réseaux sociaux est mise en avant.

Les besoins sont donc clairement identifiés : L’Ecole a comme vocation d’éduquer l’élève à la citoyenneté et à la citoyenneté numérique: L’éducation à l’internet formait jusqu’ici au fonctionnement, elle doit désormais former aux usages. Ne pas éduquer les élèves aux réseaux sociaux par un enseignement du Web 2.0 et en particulier des réseaux sociaux, c’est ne pas les éduquer à leur usage majeur de l’Internet

Le blocage quasi généralisé des réseaux sociaux à l’Ecole découle de ce constat de dérives. Mais bloquer n’éduque pas =  L’Ecole est ici défaillante dans son rôle d’éducation civique et sociale.

b) Dans le journalisme

Selon la dernière étude Nielsen (septembre 2011), 4 utilisateurs actifs de l’internet sur 5 naviguent sur les blogs et les réseaux sociaux, tandis que la consommation de l’internet mobile est en pleine expansion.

Il pourrait donc sembler logique que les journalistes, au minimum pour rester en synergie avec les usages de la société, s’emparent de ces outils dans le cadre de leurs activités professionnelles : veille, recherche et diffusion spécifique d’informations pertinentes. Mais également en empruntant de nouveaux chemins dans la circulation d’information : couverture synthétique d’événements en direct (livetweet, coveritlive, ustream, qik) ou quasi-direct (twitpic, twitvid) par des journalistes spécialistes du sujet traité,  interactions avec les internautes pour approfondir et/ou débattre d’un thème d’actualité (à l’exemple du rendez-vous interactif 13 avec vous de France 3 Lorraine).

S’approprier ces nouveaux outils, c’est aussi aider le public à y être sensibilisé, à en comprendre l’usage et à les identifier comme de véritables vecteurs journalistiques : dans ce flux continu de textes, d’images et de son déversés par les réseaux sociaux, où aller chercher les véritables informations, comment identifier les comptes pertinents.

A condition toutefois que les journalistes prennent cette voie sans se sentir contraints de le faire et en gardant pour ces usages cette curiosité qui est l’une des qualités première du reporter.

2) L’usage des  réseaux sociaux:  les leviers constatés

                                               a) Dans l’enseignement

L’usage de réseaux sociaux tels que Twitter et Tumblr depuis deux ans m’ont permis de favoriser  une meilleure communication- collaboration – implication des élèves et la communauté éducative dans les projets de classe. Les interactions et l’interactivité se sont instituées de façon horizontale comme verticale (élève/élève élève/prof, prof/prof)

Une vraie réflexion de  l’élève sur ses usages du Web 2.0 à l’Ecole comme dans sa sphère personnelle est engagée : définir son identité numérique positive en par les choix de son avatar, de sa biographie, de la ligne éditoriale qu’il veut donner à ses écrits…

Exploiter ces nouveaux supports numériques qu’offre  le Web 2.0 permet une ouverture de la classe bien au-delà des murs physiques et des représentations mentales restreintes de l’élève. Des échanges, des discussions, des projets se construisent: c’est la formation d’un vrai réseau culturel, informatif et pré-professionnalisant qui se met en place par le biais de ces outils.

b) Dans le journalisme

Utiliser de façon intelligente les réseaux sociaux peut permettre à tout journaliste de conserver (ou de remettre) un pied dans le réel. Tant il semble aux citoyens que ceux qui les informent sont parfois très éloignés de leurs réalités. Agriculteurs bretons responsables des algues vertes, jeunes de banlieues dealers de drogue ou cyclistes forcément dopés sont, par exemple, autant de clichés qui semblent s’être durablement installés dans les rédactions. Au point que proposer un autre point de vue en allant vraiment fouiller sur le terrain et en échangeant avec les internautes pour trouver d’autres sources que les sacro-saints référents systématiquement convoqués dans les grands-messes éditoriales est devenue une gageure. C’est pourtant là l’un des aspect les plus importants à prendre en compte à travers l’usage journalistique des réseaux sociaux : un apport multi-sources, direct et non cadré permettant au journalisme de rompre avec sa tour d’ivoire, cet isolement progressif qu’il s’est construit en réaction à un monde baignant dans la communication permanente et dont il prétend rester le phare, contre vents et marées.

Le risque n’est pas mince en prenant cette  voie : celui d’une confrontation directe avec le citoyen parfois au moins aussi connaisseur du dossier traité, si ce n’est plus… Un risque auquel, hormis les localiers, les journalistes sont de moins en moins exposés, parfois même souhaitent de moins en moins s’exposer. En ouvrant la voie de la gestion de communautés (Facebook et Twitter) à France 3 Lorraine, j’ai très vite été confronté avec ces échanges parfois très directs, parfois très violents mais toujours enrichissants une fois le 1er choc passé. Et souvent ils m’ont permis d’alerter un collègue sur une imperfection dans son reportage ou simplement d’alerter sur un fait qui nous avait échappé, renseigné par une source dont j’ignorais jusqu’à l’existence mais qui elle suivait de très près notre activité sur la toile.

Une plus forte réactivité et une simplicité pour la couverture d’évènements à travers des dispositifs existants (géolocalisation, couverture live) ou qu’il nous a fallu développer (sites internet évènementielles, player intégré) sont des marqueurs forts pour dire au public : “nous sommes en phase avec vos usages, nous vous en proposons même de nouveaux, appropriez-les vous et dites-nous comment les améliorer”.

Mon constat aujourd’hui est qu’en jouant régionalement la carte de la présence de notre antenne sur les réseaux sociaux, un autre public a rejoint la sphère de diffusion de France 3 Lorraine. Composé en partie (20% si je m’appuie sur la notion d’âge apportée par les statistiques de notre page Fan Facebook) par nos téléspectateurs, il est surtout plus jeune (72% de 18-45 ans) et plus exigeant car non captif. C’est à nous de le conserver à travers des propositions quotidiennes concrètes : info-services, sollicitations, interactions relayées par des diffusions de commentaires, photos, webcams et vidéos dans nos programmes (Lorraine Matin) et nos fenêtres d’information (13 avec vous), breakingnews, etc. Sans pour autant l’inonder d’informations et tout en définissant quelles informations donner sur quel réseau social.

Partis de rien en septembre 2010, notre page Facebook et notre fil Twitter sont aujourd’hui identifiés régionalement comme des flux d’informations pertinents et commencent à se faire une place au niveau national, voire international sur des couvertures événementielles spécifiques (Festival du film fantastique de Gérardmer, Lorraine Mondial Air Ballons).

3) L’usage des réseaux sociaux : les freins identifiés  

a) Dans l’enseignement

La réticence dans l’usage des réseaux sociaux en classe se rencontre à deux niveaux :

Pour l’Education nationale:

– une réticence par manque de connaissance sur le sujet. Peu d’enseignants sont initiés au web 2.0 et plus largement aux TICE même s’ils le pratiquent de façon personnelle.

– L’éducation est perçue de façon traditionnelle: “la meilleure éducation est celle reçue par papa et maman”. Le retour aux valeurs traditionnelles sûres (comme la préconisation de la morale à l’école…) n’incite pas au développement des TICE et encore plus des réseaux sociaux en classe.

L’internet et en particulier le web 2.0 font peur et à juste titre s’ils sont mal connus, s’ils sont mal maîtrisés.

– Le constat est le même pour les élèves :

La notion d’espace personnel : l’usage personnel et la part majeure que le réseau prend dans leur vie sociale ne suppose qu’ils veuillent pour autant le transposer en classe. C’est une part identitaire de l’élève dans laquelle, s’il  le désire, y côtoyer des adultes (enseignants, parents…) : mais le réseau social représente pour lui une sphère sociale privée. C’est son espace de plaisir, de loisirs, de dérives aussi: la perspective sérieuse, réfléchie que suppose l’intrusion de l’éducation dans cet espace ne lui convient pas.

Un espace qui n’est pas sérieux: l’adolescent est réaliste sur ses usages des réseaux sociaux: ils jugent eux même leurs usages (textes, photos, vidéos) sans règles, sans fond, dégradants. C’est antinomique avec l’image de ce que doit leur apporter l’Ecole: cadre de règles, apport de savoirs, respect de l’autre. Si elle est défaillante dans ces apports, l’Elève lui rappelle. Lui a droit de s’y opposer mais l’Ecole doit être infaillible dans ses devoirs.

Les enseignants comme les élèves ne voient pas pourquoi et comment utiliser ces outils web 2.0 dans l’éducation. Associés à des dérives réelles et à une image fantasmée du “mal” le réseau social est cloué au pilori.

b) Dans le journalisme

Ce n’est pas le moindre des paradoxes : les journalistes supposés être curieux et ouverts au monde sont parmi les plus réticents à l’abord d’internet et à l’usage des réseaux sociaux, dont bien peu d’entre-deux connaissent le fonctionnement et les usages. Se coupant ainsi volontairement de toute possibilité d’appréhension différente de la société et du quotidien des citoyens. La vision qui prévaut aujourd’hui est celle matraquée dans les écoles de journalisme appuyée sur de vieux fondamentaux indispensables comme la vérification des sources mais qui rejettent le plus souvent l’internet au motif que rien n’y est vérifiable. Ce qui est à tout le moins une méconnaissance grave de ce qu’est l’internet et de (ce) qui s’y expose…

Plus que la fainéantise d’aller fouiller sur la Toile (argument que j’entends régulièrement, qui n’est pas totalement faux, mais certainement pas la raison première de l’attitude actuelle d’une grande partie des journalistes), c’est sans doute dans une certaine technophobie (je suis un intellectuel, pas un manuel pousse-boutons-photographe-vidéaste, c’est bon pour les débutants shivas) et dans la peur de la vitesse non-maîtrisée de la circulation de l’information multi-format, qu’il faut chercher la forte prévention que connaissent aujourd’hui les rédactions écrites et audiovisuelles. Je généralise bien sûr. Mais pas tant que cela.

La volonté de garder le temps de la réflexion et la maîtrise du timing de délivrance de l’information après les nécessaires vérifications conforte le journaliste dans l’idée -un peu prétentieuse- qu’il est le seul juge de paix à même de décider quand un fait avéré devient une information à laquelle a droit le public. Prendre la voie de l’internet, à l’image de monsieur-tout-le-monde-se-désignant-journaliste-citoyen, c’est en soi désacraliser la fonction journalistique dont le caractère indispensable est gravé dans le marbre de la Constitution et de la DDHC.

Mais pour ceux qui refusent la mort du journalisme en faisant le choix de se lancer dans l’aventure, les choses ne sont pas simples lorsqu’il s’agit d’intégrer les réseaux sociaux dans la pratique quotidienne.

Quel réseau pour quel usage ? Facebook, Twitter, Quora, Bing, Google+, LinkedIn, Viadéo, MySpace, Deezer, Live Messenger ? Chacun a ses spécificités. Et les usages sont parfois aussi culturels. S’appuyer sur un modèle anglo-saxon n’est pas forcément judicieux.

Et comment définir les frontières de cet usage quand deux services souhaitent s’approprier l’outil ? De la rédaction ou du service communication, qui a le dernier mot ? Avez-vous remarqué que dans les médias, le nombre de poste ayant internet et les réseaux sociaux sous leur responsabilité  sont le plus souvent occupés non par des journalistes mais par des hommes et des femmes issus de la communication et du marketing… Sont-ils à même de garantir la justesse d’une information délivrée ? Savent-ils même ce qu’est, journalistiquement parlant, une information ? Un média sur la toile, dans son expression des réseaux sociaux, doit-il être aussi un outil de propagande ?

Quant à l’argument -si souvent opposé à celles et ceux qui souhaitent faire la part belle à leur média sur les réseaux sociaux- du modèle économique non assuré, que répondre d’autre finalement que lorsque la presse écrite est apparue, son modèle économique n’était pas plus assuré ! Et que c’est notamment la qualité de l’information délivrée, l’identité de ceux qui la rédigeaient, qui petit à petit ont provoqué une appétence telle que faire vivre un journal et en vivre devenait une pensée raisonnable.

Bien malin toutefois celui qui peut affirmer que l’Histoire va se répéter. Sans doute faut-il innover encore en s’appuyant sur des leviers en création, comme les normes permettant la diffusion sécurisée d’informations en situation de mobilité. Mais personne ne peut imaginer aujourd’hui que le journalisme et l’internet puisse vivre en s’ignorant.

Dès lors, c’est à l’étape suivante qu’il faut passer, celle de la formation des journalistes. Par qui, comment, avec quels outils ? Des questions fondamentales qui doivent accompagner une révolution des esprits dans les écoles et les rédactions : il faut passer désormais du don de l’information à l’échange d’informations et au débat sur l’information : du 1.0 au 2.0.

Et préparer le 3.0 : là où le journaliste-facilitateur de dialogue s’efface derrière le dialogue qu’il a créé entre internautes à partir d’une info vérifiée et diffusée et sur laquelle il doit conserver un œil afin de l’enrichir du contenu du débat initié.

4) L’usage des réseaux sociaux: quelles améliorations envisager?

 1) Dans l’enseignement

Pour convaincre de l’utilité de l’outil, il faut prouver et se démarquer: l’usage du réseau social en classe ne doit pas être utilisé comme une fin en soi. IL n’est qu’un outil à insérer dans un projet pédagogique.

Les règles, les garde-fous doivent être clairs et définis avec l’élève, avec la communauté éducative, administrative et avec les parents.

La première finalité de cet usage doit être l’éducation à l’internet et en particulier au Web 2.0.

Eduquer à l’internet en classe aujourd’hui sans éduquer au Web 2.0 et en particulier aux R.S. est un manque important dans l’éducation à la citoyenneté et citoyenneté numérique de l’élève.

Ces usages ne se feront pas sans une vraie vulgarisation des TICE à l’école qui passe par la formation des enseignants; par celles des élèves, par un matériel correct mis à disposition en classe et sans une vraie prise de conscience générale quant à l’éducation obligatoire à l’Internet.

2) Dans le journalisme

Pour les journalistes, il est indispensable de balayer les fantasmes sur les dangers à utiliser et à être présent sur les réseaux sociaux. Des fantasmes qu’ils relaient trop souvent, par méconnaissance de ces outils nouveaux. Il convient dès lors d’expliquer, montrer et expérimenter, en temps réel, dans chaque rédaction, pour convaincre de l’utilité des réseaux sociaux.

Instaurer ce dialogue c’est aussi construire le journalisme de demain même si les contours en sont flous en raison de l’appropriation possible de l’outil par chacun pour peu qu’il dispose d’un accès à l’internet et de l’envie de partager ce qu’il vit, voit ou ressent.

Ce dialogue doit s’accompagner d’une réflexion approfondie sur les pratiques journalistiques : comment gérer l’urgence (Comment se positionner face à la multitude de smartphones de témoins sur un événement ?), le risque de manipulation (ce compte Twitter est-il un compte officiel ?), les critères de la délivrance d’informations (on donne d’abord, on affine et/ou on corrige ensuite ?).

De même, l’élaboration d’une charte est nécessaire pour préciser les frontières entre la présence professionnelle et la présence personnelle sur les réseaux sociaux. Or face au développement de la soi-disant assimilation par le public d’un journaliste à son média, trop de responsables de rédaction (souvent non-journalistes, la plupart du temps très déconnectés de la réalité de la Toile) préfèrent ouvrir une multitude de parapluies en interdisant toute parole personnelle ou en la menaçant implicitement à travers des textes très sclérosants. C’est le syndrome du “tout tweet pourra être retenu contre vous” gommant à la fois les principes fondamentaux et constitutionnels de la liberté d’expression, de la liberté d’opinion et du droit à l’information.

Tout en oubliant qu’au regard du droit français, un journaliste l’est car il reçoit plus de 50% de ses revenus par son activité journalistique et non parce qu’il travaille pour un média reconnu. En France on est d’abord journaliste tout court avant de l’être pour tel ou tel média. Donc on peut éventuellement aussi critiquer son média, y compris sur les réseaux sociaux.

Conclusion : même problématique en journalisme qu’en éducation

– Les possibilités qu’offrent les réseaux sociaux sont immenses : flux d’informations, ouverture au monde, interactivité et interactions  qui permettent pour la 1ère fois une vraie implication de l’élève et du spectateur (internaute, auditeur, lecteur, téléspectateur) qui devient spect-acteur , tout cela permet de briser une barrière mentale forte: le journaliste comme l’enseignant détiennent “la” vérité “ et sont au-dessus de celui à qui ils diffusent l’information/diffuse le savoir.

– Ce qui ne suppose pas pour autant la dégradation de la valeur enseignante et journalistique : ces professionnels savent traiter les informations et les savoirs, ce sont des compétences qui s’apprennent et ne sont pas accessible à tout le monde. On n’est pas enseignant parce qu’on a gravi les échelons jusqu’à devenir manager ou parce que l’on est un élève riche d’un savoir fraichement acquis. On n’est pas journaliste parce que l’on diffuse une information. On est journaliste parce qu’on sait la chercher, la sourcer, la vérifier, la délivrer de la façon la plus appropriée. On est enseignant parce que l’on est formé à enseigner des savoirs en employant une pédagogie adaptée.

– La nécessité de poser des règles, des garde-fous, d’instituer des chartes est impérieuse : l’avènement des réseaux sociaux dans le journalisme comme dans l’enseignement ne doit pas conduire à la dégradation de ces métiers et des valeurs, savoirs et compétences qu’ils sont censés véhiculer. Même si c’est parfois à l’aveugle que les usages en sont définis en raison de leur nouveauté : “apprendre en marchant”.

Mais ne pas utiliser les réseaux sociaux, nier jusqu’à leur existence sur le plan professionnel est à terme une erreur:

– en journalisme parce que les réseaux sociaux sont déjà dans certains pays le premier vecteur d’information

– en enseignement : parce que l’école a un devoir d’éducation aux médias et à l’internet : le Web 2.0 et les réseaux sociaux  y ont désormais une place prépondérante.

Pour le journalisme, comme pour l’enseignement, les réseaux sociaux, bien plus qu’une mode à suivre parfois maladroitement (création de comptes Twitter rapidement délaissés), sont un outil multiformes et multi-plateformes à apprivoiser et à s’approprier pour faire de l’élève comme du citoyen, un usager conscient et raisonnable dans son appréhension quotidienne de cette fenêtre ouverte sur le Monde.

Références et contacts

Laurence Juin

Blogs : maonziemeannee.wordpress.com et http://fromplane.wordpress.com/

Twitter : @frompennylane / Facebook : Laurence Juin

Jean-Christophe Dupuis-Rémond

Blog : numelog.wordpress.com / Twitter : @jcdrpro /Facebook : Jc Dupuis-Rémond – Pro